Rapport d’enquête sur le heurt d’agents de maintenance par un TER le 18/03/2020 à Schiltigheim

Mercredi 18 mars 2020 à 9 h 37, trois agents de maintenance de l’infrastructure ferroviaire sont heurtés par un train express régional au nord de la gare de Strasbourg. Le train roulait à 96 km/h. L’un des agents décède, un autre agent est blessé grièvement et un autre est blessé légèrement.
Les trois agents accidentés traversaient la voie empruntée par le train afin de commencer une opération d’inspection de cette voie prévue dans le cadre de la maintenance de l’infrastructure. Les trois agents traversaient groupés et ne prêtaient pas attention aux circulations. Ils ne se sont pas rendu compte de l’approche du train.

L’accident s’est produit parce que les agents se croyaient protégés par une présumée absence de circulation sur la voie traversée. L’agent responsable de l’équipe avait préalablement échangé des informations au téléphone avec le poste d’aiguillage sur l’état du trafic. Par suite d’une mauvaise compréhension, il en avait conclu, à tort, qu’aucun train ne circulait.

Deux écarts importants aux consignes de sécurité prévues pour prévenir le danger de heurt des agents sur les voies ont facilité l’accident :
- D’une part, l’assurance d’une protection vis-à-vis des circulations ne pouvait résulter que de la mise en œuvre d’une procédure exigeante interdisant toute circulation, qui n’a pas été réalisée. En s’informant uniquement des circulations par téléphone, l’agent responsable de la tournée a mis en place un pseudo-système de protection pour le travail dans les voies qui présentait des risques, et qui sortait de tout cadre réglé.
- D’autre part, la traversée des voies s’est opérée sans respecter la consigne de sécurité qui prescrit de prêter attention et de ne pas traverser en groupe, en chaque occasion où il n’y a pas une interdiction de circulation.

L’enquête technique a mis en évidence plusieurs facteurs organisationnels et humains qui ont contribué à ces écarts.
Ces facteurs sont les suivants :

  1. Le contexte particulier de la journée du 18 mars 2020, première à être travaillée par les agents dans le cadre du premier confinement généralisé institué en France en mars 2020 pour faire face à la pandémie Covid-19. Ce contexte apportait à chacun préoccupation, anxiété, une organisation perturbée de son activité, et un environnement de circulations moindres. Ces perturbations ont conduit à ne pas avoir de fermeture de voie préprogrammée pour le travail, ainsi que, pour le responsable de l’équipe, à ne pas disposer d’un carnet nécessaire à la demande d’une fermeture de voie par suite d’un changement de véhicule. Ces perturbations ont aussi pu faciliter un abaissement de vigilance à l’application des mesures de sécurité à respecter.
  2. La teneur du dialogue téléphonique, ce matin-là, entre l’agent responsable de la maintenance et l’agent du poste d’aiguillage qui n’avait pas la rigueur nécessaire à l’échange d’informations portant sur la sécurité. Ce dialogue a conduit à la mise en place implicite d’une pseudo-mesure de protection qui n’entre dans aucun cadre prescrit, et qui ne présentait aucune garantie.
  3. Une non-contestation, par les deux agents qui accompagnaient le responsable de la maintenance, des écarts aux règles de sécurité du fait d’une dynamique d’entraînement au sein de l’équipe.
  4. L’absence, dans la surveillance et la veille sur la sécurité des agents par le management, de détection et de correction des distorsions portant sur les communications de sécurité et les pratiques de protection.
  5. Le recours attendu à un procédé de sécurité, de demande de « fermeture de voie », sensible à l’écart et au facteur humain, alors que des solutions plus modernes et plus sûres de protection sont applicables pour une zone à voies multiples et de circulation habituellement dense.
  6. Le non-signalement du train aux agents. Le conducteur, surpris et agissant par réflexe, a en effet privilégié l’action sur le freinage d’urgence à l’activation de l’avertisseur sonore. Il est toutefois difficile de déterminer si cette activation aurait changé l’issue de l’accident.

Le BEA-TT émet 4 recommandations et 2 invitations pour prévenir ce type d’accident.

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