Rapport d’enquête sur la collision entre deux trains de voyageurs le 16/02/2005 à Longueville

Le 16 février 2005, à 19 h 23, le train 117 710 en provenance de Provins (Seine et Marne) prend en écharpe en gare de Longueville (Seine et Marne) le train 117 578. Par chance, aucun blessé n’est à déplorer ; seuls sont à subir des dégâts matériels : la voiture de tête de la rame tamponnée est éventrée, la locomotive de la rame tamponneuse a quelques dommages au niveau du châssis, et la voie ainsi que le quai contigu sont déformés. Les deux trains impliqués sont constitués de rames réversibles (une cabine de conduite est disposée à chaque extrémité) « inox » diesel. La ligne de Longueville à Provins est exploitée par la société CFTA, en sous-traitance de la SNCF.

En gare de Provins, au cours des opérations de préparation de sa cabine de conduite pour assurer le train 117 710, le conducteur opère d’une manière inusitée, rendue possible par une protection mécanique insuffisante de la poignée de la serrure de réversibilité. Le système mécanique de réversibilité de la locomotive, qui active la commande du frein, n’est pas bloqué en position locomotive « menante » et se trouve dans un état instable entre les positions « menante » et « menée ». Les vibrations subies par l’engin moteur transmises au système de réversibilité provoquent la déconnexion de la commande du frein, rendant inefficace la commande normale du frein de la cabine de la locomotive. Lorsque le conducteur s’aperçoit qu’il est en dérive au moment de réaliser un arrêt commercial, il ne met pas en œuvre les autres moyens de freinage d’urgence qui restaient à sa disposition. Il ne se sert que du frein à main de la locomotive, agissant sur un seul essieu (au lieu de quatre), ce qui est insuffisant pour s’arrêter avant l’aiguillage où se trouve immobilisé le train 117578. Ce conducteur ne maîtrisait pas les gestes du métier en situation d’urgence.

La locomotive concernée, du type « BB 66400 » en service depuis 1969, a présenté un défaut du fait que sa serrure mécanique de réversibilité n’a pas été verrouillée en position opérationnelle de marche ; les vibrations de l’engin ont alors provoqué une rotation de l’axe cette serrure de réversibilité, entraînant l’inhibition de la commande du frein.

La SNCF est invitée à modifier les locomotives de ce type en rendant impossible un mauvais verrouillage de la serrure de réversibilité, soit en la remplaçant par une commande électrique, soit en contrôlant son verrouillage effectif dans la chaîne de sécurité de conduite de l’engin.
La SNCF est invitée à rechercher si d’autres séries d’engins circulant sur le réseau ferré national (quel que soit l’opérateur concerné), munis eux aussi d’un système semblable d’inhibition de la commande du frein, ne sont pas à modifier en conséquence, et à en avertir les propriétaires.

Au plan de l’expérience des agents de conduite, l’exploitation d’une section de ligne de sept kilomètres comme c’est le cas pour Longueville - Provins constitue un domaine très restreint, propice à la prise d’habitudes et inadapté pour acquérir l’expérience des situations de conduite perturbées. L’opérateur principal et son sous-traitant, ainsi que la DGMT devraient réexaminer de telles organisations dont l’étendue restreinte ne permet pas d’acquérir une réelle expérience de la conduite des trains, et par voie de conséquence, de disposer d’un retour d’expérience plausible.

Au plan du management, la CFTA doit compléter son dispositif relatif à la formation de ses conducteurs et agents de trains : rédaction des cahiers des charges de formation et mise en application, formations pratiques sur le matériel roulant, réalisation systématique des entretiens individuels, amélioration du contenu des plans d’action sécurité.

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